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LA DOUBLE MAÎTRESSE

légitime satisfaction et votre bonheur d’être déchargée d’un grand devoir. Maintenant que cette belle œuvre est terminée, il vous serait doux, ma chère fille, de rentrer en votre paix intérieure, mais le bien est insatiable. Ne croyez-vous pas que d’autres soins vous appellent et resterez-vous sourde à leur voix ?

« Je vous ai toujours tenue quitte des œuvres extérieures, continua l’évêque en souriant, mais Dieu vous en réserve une à laquelle vous ne vous attendiez point. Dieu a pourvu de lui-même au remploi de votre loisir. Il sait tous nos besoins et même ceux dont nous ne nous doutons pas. Il faut que vous accueilliez votre nièce Julie de Mausseuil. »

Le choc fut dur. Aux premiers mots, Mme de Galandot se rebiffa avec une sécheresse et une hauteur déterminées. L’évêque ne se déconcerta point : il avait subi de plus rudes assauts et lié de plus fortes parties et il savait bien des chemins. Il prit d’abord celui de radoucir. Puis, l’effet manquant, il parla à son tour haut et sec, redressé dans sa petite taille. Ses mains agiles et persuasives gesticulaient aux yeux de Mme de Galandot qui voyait passer et repasser devant elle, à l’annulaire, le point d’or de l’anneau épiscopal et ne répondait rien. Alors M. de la Grangère s’échauffa. Il dénonça le murmure public, le scandale de cet abandon, exigeant par calcul plus qu’il ne voulait, puis, tout à coup, réduisant l’obligation à trois mois, qu’il obtint. On fixa le séjour, chaque année, de la mi-juillet à la mi-octobre.