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EFFIGIE DOUBLE

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Dans une terre grise et pareille à la cendre
De ton cher souvenir voluptueux et tendre
Qui s’effrite incertain dans le vent du passé,
J’ai fait revivre ainsi ton visage effacé ;
Le voici. Tu reviens du fond de ma mémoire
Où, dans l’ombre, tes mains ont cueilli la fleur noire,
Rose funèbre née en un jardin obscur.
Te voici. J’ai revu ta face au contour pur
Et j’ai fait onduler sur ton front qui les bombe
Tes deux bandeaux comme deux ailes de colombe,
Et pourtant j’ai laissé tes yeux à jamais clos.
Ô regret ! La caresse en vain de mes doigts chauds
Tenterait de rouvrir leur douceur endormie.
Mais le sourire qui, sur les lèvres unies
De ta bouche amoureuse, erre amoureusement
Encore, suffira, lorsque les doigts du temps