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LA PENSÉE



Ma pensée, au retour d’elle-même, s’incline
Et, souriante, arrache à son récent essor
La rapide sandale où vibre et tremble encor
L’aile double jadis qui l’a faite divine.
 
Elle a passé le fleuve et passé la colline,
Dormi dans la forêt et dormi dans le port
Et rapporte en ses yeux des songes d’ombre et d’or
Pleins du parfum des bois et de l’odeur marine.

Et, pesante qui marche ou légère qui vole,
Elle effleure en passant l’herbe que son pied frôle
Ou marque son pas lourd sur le sol du chemin.
 
Car pour que son talon pèse ou se pose à peine
Un dieu furtivement n’a pas lié en vain
La sandale terrestre à l’aile aérienne.