Page:Régnier - L’Illusion héroïque de Tito Bassi, 1917.djvu/140

Cette page a été validée par deux contributeurs.

plus éloquent, ni de plus propre à faire valoir ce que je pouvais avoir de mérite. Parfois, Sa Seigneurie me disait, quand je ne lui semblais pas assez pénétré de toute la grandeur de mon personnage :

— Songes-tu, mon Tito, que tu as à représenter le maître du monde et à prononcer par ta bouche quelques-unes des plus belles sentences de tragédie qui aient jamais été écrites !

À ces encouragements, je redoublais d’efforts. Ma voix s’enflait et remplissait de ses éclats la grande salle de la Rotonda et il me semblait que la rondeur sonore de sa coupole fût la couronne même de mon génie.

Ce fut à ce moment que j’atteignis le plus haut point de ce que je pourrais appeler mon illusion héroïque. Plût à Dieu que j’eusse à arrêter là mon récit et que je n’eusse rien à y ajouter ! Si quelque accident eût interrompu ma vie à cet instant, je n’aurais eu qu’à en louer le ciel, mais le sort malicieux ne l’a pas