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à son gré les quitter au bout de l’année, les plus longs engagements ne passant pas ce terme. Mais ce qu’il y a de merveilleux, c’est que dans ces lieux favorisés du ciel existe la fontaine de Jouvence. Devient-on vieux ? on va s’y baigner, et l’on en sort n’ayant plus que vingt ans.

Tel est le pays de Cocagne, dont on fait honneur à l’imagination d’un trouvère du treizième siècle, mais qui se retrouve pourtant trait pour trait (excepté la fontaine de Jouvence), dans les descriptions que des poëtes grecs ont faites de l’âge d’or. Voici comment Phérécrate, auteur comique athénien du temps de Platon, a parlé du retour de cet âge : « Qu’avons-nous besoin de laboureurs, de charrues, de taillandiers, de forgerons, de semences, d’échalas ? Des fleuves de sauce noire, sortant à gros bouillons des sources de Plutus, vont couler dans les rues, roulant des pains faits avec de la fine fleur de farine, et des gâteaux délicieux ; il n’y aura qu’à puiser. Jupiter faisant pleuvoir du vin capnias, arrosera les toits des maisons, d’où découleront des ruisseaux de cette précieuse liqueur avec des tartelettes au fromage, de la purée toute chaude, et du vermicelle assaisonné de lis et d’anémones. Les arbres qui sont sur les montagnes porteront, au lieu de feuilles, des intestins de chevreaux rôtis, des calmars bien tendres et des grives braisées. »

Voici comment Téléclide, autre auteur comique athénien, a décrit les délices de l’âge d’or : « Il ne coulait que du vin dans tous les torrents. Les gâteaux se disputaient avec les pains autour de la bouche des hommes, suppliant qu’on les avalât, si l’on voulait manger tout ce qu’il y avait de plus blanc en ce genre. Les tables étaient couvertes de poissons qui venaient dans chaque demeure se rôtir eux-mêmes. Un fleuve de sauce coulait auprès des lits, roulant des morceaux de viande cuite, et des ragoûts étaient auprès des convives pour qui voulait en prendre, de sorte que chacun pouvait manger à discrétion des bouchées bien tendres et bien arrosées… Des petits-pâtés et des grives toutes rôties volaient dans le gosier. On entendait le bruit des gâteaux qui se poussaient et repoussaient autour de la bouche pour entrer. »