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s’il est lui-même en rapport avec le genre d’une semblable imitation, en augmentera le mérite. Cette utilité abstraite n’en produira que plus certainement son effet, si elle peut se trouver réunie dans une application usuelle avec l’intérêt positif d’une nation, avec ses institutions pratiques, avec les points habituels de sa croyance et de ses dogmes.

Sans doute ce fut pour les Arts de la Grèce une heureuse sujétion, que celle qui, dès l’origine, força ses artistes d’appliquer l’imitation corporelle de la nature aux plus idéales combinaisons de la pensée. Sans doute, d’aussi hautes destinations ne peuvent plus inspirer aujourd’hui le génie de nos artistes. Il n’existe plus pour eux ce monde tout à la fois réel et imaginaire, ce peuple d’êtres abstraits, dont les corps ne devaient être que des enveloppes, si l’on peut dire, transparentes, de toutes les perfections immatérielles. Il est détruit pour eux cet empire des fictions, où la fantaisie se lassa plutôt de produire, que l’Art de réaliser les images du beau. Il n’y a plus d’Olympe où l’esprit exalté puisse s’élever sur les ailes d’une foi poétique, pour en faire descendre sur la terre les images d’une perfection surhumaine. Mais si de nos jours le talent a moins de secours pour se