nullement l’Éternel Masculin. Et d’abord, parce que le Simple
n’a aucune idée du péché originel. Il ne connaît la pitié que
pour l’aavoir apprise de Gurnecmanz, qui lui fit honte d’avoir
tué un cygne. Il ne connaît la souffrance que pour avoir vu
saigner la plaie d’Amfortas. Il n’a jamais eu la révélation du
bien et du mal. Toute notion du désir lui manque. Entouré
par les filles-fleurs, le Fol s’amuse de ces sœurs fragiles et
jolies, jusqu’à ce que Kundey, subitement apparue, entreprenne
de l’instruire. Et cette bonne connaisseuse du cœur humain,
comment saurait-elle atteindre plus sûrement Parsifal qu’en
lui rappelant le souvenir da sa mère ? Par ce détour, déjà
l’âme du candide est toute séduite et faiblissante lorsque
Kundry, comme Brunhilde, dépose un baiser sur les lèvres de
celui qu’elle convoite. Et comme Siegfried à qui, dans cet instant,
la peur estl révélée, Parsifal prend soudain conscience,
dans le baiser de Kundry, du mystère du monde. Il conçoit le
péché. Il se souvient de la plaie d’Amfortas. Il a la vision
de la douleur qui pèse sur les hommes et dont il possède
seul le pouvoir de les affranchir. Il voit tout ensemble son
inconscience passée et sa future responsabilité. Il aperçoit
même que le seul moyen de sauver la Tentatrice est de lui
résister. Il la repousse. Il triomphe d’elle et de lui-même. Il
propose au monde une philosophie nouvelle, une sainteté
humaine, laïque. Car Parsifal ne se fait nullement le champion
du renoncement total et le recruteur des monastères. Plus
tard il connaîtra l’amour et engendrera Lohengrin. Mais il
apprend à devenir son maître, le législateur de sa volonté, et
Wagner, pour la première fois, fête la victoire de la vie sur
la mort.
Quel étonnant spectacle que celui de ce vieillard chantant dans sa dernière œuvre un hymne de confiance à la nature et à l’action ! « Car ce n’est pas la misère du faible à qui pitié est due, dit-il, le but à atteindre est la miséricorde dans l’âme du fort. » Il n’y a pas da doctrine dans Parsifal, mais un exemple. Lorsque le Simple retourne au burg du Graal, qu’il guérit le flanc d’Amfortas par l’attouchement de la lance reconquise sur Klingsor, et que la Nature en fleur entonne l’Enchantement du Vendredi-Saint, rien de tout cela ne ressemble à une prédication pascale. C’est un nouvel acte de foi en l’homme. Un témoignage plein de trouble et de reconnais-
