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PARSIFAL CHEZ LES FILLES-FLEURS


flatter encore mieux mon goût, c’est-à-dire : les raies chamois seront gris d’argent, et le bleu, mon rose (très pâle et tendre). Et la robe japonaise ? Je regarde à toute heure votre magnifique tableau aux cheveux noirs. (Est-ce vous ?). Vous me faites peur avec vos essences ; J’en commettrais des bêtises. En général, je préfère les poudres, puisqu’elles s’attachent plus doucement aux étoffes… Mais, encore une fois, soyez prodigue, surtout pour la grande quantité des eaux pour le bain, telles que les « ambres », etc… J’ai la baignoire au-dessous de mon atelier et j’aime à sentir monter les odeurs. Du reste, ne pensez pas mal de moi ! Je suis assez âgé pour me permettre ces enfantillages ! J’ai les trois ans de Parsifal devant moi et rien ne doit m’arracher à ma douce paix de réclusion productive. Venez… oh, chère âme, bien-aimée âme ! Tout est si tragique, tout (ce) qui est réel. Mais vous m’aimez toujours — et moi je ne saurais pas (faire) autrement, même avec la plus forte volonté. Mille baisers. R. »

« Chère âme ! Ne criez plus ! Je ne me souviens de vos embrassements que comme du plus enivrant et du plus enorgueillant événement de ma vie. C’était un dernier don des dieux qui ne voulaient pas que je succombe au chagrin de ma fausse gloire des représentations du Nibelungen. Mais, quoi, parler des misérabilités ! Je ne crie pas, mais je garde dans mes meilleurs moments un désir si doux, si bienfaisant, ce désir de vous embrasser encore et de ne pas perdre jamais votre divin amour. Vous êtes à moi, n’est-ce pas ? »

« …Ma Judith ! Je dis Meine Judith, geliebtes Weib ! (Voir le dictionnaire, ah !). Tout est bien arrivé. Les babouches, le lait d’iris ; excellent. Mais il en faut beaucoup : un demi-flacon pour le bain et j’en prends tous les jours. Pensez-y. La Rose de Bengale de Rimmel l’emporte sur la White Rose. Adoptons-la et envoyez-m’en une multitude — car je suis excessif. Et quoi encore ? Oui, je veux absolument que vous vous portiez bien, car je passe très souvent devant cette pauvre maison de Bayreuth (d’où) je fus chassé par vous. Mais avant tout, comment cela va-t-il avec votre robe japonaise ? Oh, la belle idée ! Mon âme m’aime. Sous peu de jours j’aurai fini la composition du premier acte. Vous en aurez après des échantillons. Aimez-moi, belle Abondance Souffrante ! — Richard. » (Du 27/1/1878.)