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astreint, de la soumission à l’esprit de tes parents, et tu crois que tout cela va te condamner à la routine, t’endormir dans l’ignorance et te fermer les routes du progrès… Mon Dieu ! d’abord, cette routine, que tu crains, est-elle vraiment un mal, ici, à la campagne ; et ce progrès, vers lequel tu aspires, est-il vraiment un bien ?… Car, enfin, pour ce qui est du progrès, s’il est vrai qu’il comporte avec lui ses avantages, es-tu bien sûr que la somme des bénéfices que tu pourras en recueillir va surpasser en valeur et en nombre la somme des dommages ? Tu en parles à ton aise, du progrès. Prends-y garde !… Souvent, dans sa course triomphale, il écrase une pauvre chose, un pauvre rien ; et ce pauvre rien, et cette pauvre chose nous manquent si bien quelquefois que nous cherchons en vain à les remplacer… Et puis, la réflexion et l’expérience te font défaut, mon enfant, et tu ne peux concevoir qu’entre cette routine et la fièvre des nouveautés il peut y avoir de la place pour de l’avancement normal et modéré… Tu aurais assurément tort de croire que la vie que mènent tes parents et tes voisins n’admet aucune progression raisonnable. Non, il est loin d’en être ainsi ; si tu avais plus d’expérience, moins de préjugés, tu saurais que sa vraie valeur réside même en ce fait qu’elle est juste assez large pour accueillir, sans se briser, les institutions nouvelles, et