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nous envahir aujourd’hui, n’existât pas. Mais Paul avait beau se dire qu’il était un immigrant ordinaire, comme ceux qu’il avait vus arriver au Canada, il se trompait. Sans doute, c’étaient de pauvres hères, sans un sou vaillant dans leur gousset, comme lui. Comme lui, ils s’étaient imaginés qu’ils n’avaient qu’à traverser un océan pour voir accourir vers eux toutes les chances de fortune dont le passé, au pays ancestral, les avait si fâcheusement privés ; mais les conditions respectives des pays qu’ils échangeaient, établissaient entre sa situation et la leur une différence remarquable qui, malheureusement, n’était pas à l’avantage de notre héros…

Si le métier d’immigrant était difficile à l’époque de Paul, à qui il n’avait pas réussi même après deux années d’application soutenue, il l’est encore davantage de nos jours. L’opération ne va pas toute seule, tant s’en faut. D’abord, en général, les émigrants et les immigrants oublient trop souvent le lest quand ils mettent à la voile et c’est la cause de plus de catastrophes qu’on ne pourrait l’imaginer. On le constate tous les jours, tous ceux qui immigrent cherchent invariablement à se jeter dans des spécialités auxquelles leurs aptitudes les recommandent le moins. Un homme nous arrive de l’autre côté ; que ce soit un mineur, un débardeur, un baron ou un comte ; qu’il sorte