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qui s’y tiennent, d’entendre les blasphèmes éructés entre deux hoquets et de surprendre les complots qui se trament cyniquement dans cette atmosphère empestée d’alcool, de fumée et de sueurs !

Jusque-là, Paul avait évité avec horreur ces lieux maudits… Mais il y avait la sombre nostalgie dont il voulait se débarrasser à tout prix ; mais il y avait l’ennui qui le guettait sans cesse à toutes les heures du jour et de la nuit. Alors, il souffrait. Et souffrir, pour lui, c’était chose relativement nouvelle ; et, il cherchait à se révolter contre cette puissance inconnue qui étreignait son cœur dans de pesants anneaux de fer ! Oh ! s’étourdir, alors ; oh ! oublier, à tout prix ; ne fut-ce qu’un instant…

Et, un soir, il s’était laissé entraîner, par un camarade, dans un de ces estaminets qui pullulent dans les quartiers ouvriers des grandes villes. Il y fit des connaissances et s’amusa bien, l’ivresse aidant. Il y retourna le lendemain. Les jours suivants, quand l’ennui le prenait et qu’il avait peur de la solitude, le soir, il y allait de nouveau, toujours.

Allait-il donc tomber tout à fait, comme tant d’autres, qui, eux aussi, avaient été bons, allait-il donc s’avilir, se ravaler au niveau de cette classe d’ivrognes ? Sa débauche allait-elle devenir repoussante et vulgaire, com-