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LE « MEMBRE »

raient les portraits des principaux chefs politiques du pays. Au-dessus de la table d’honneur, on avait pendu le portrait en pied du héros de la fête.

Tout le monde attendait maintenant l’arrivée du député et du maire de la paroisse qui devait présider le banquet. Les convives avaient revêtu leurs plus beaux habits du dimanche et les chemises et les collets sentaient l’empois à deux pas à la ronde. Ce retard des officiels provoquait, à la vérité, chez les convives, un véritable supplice de Tantale ; et les yeux se tournaient goulûment vers les tables que doraient les choses les plus appétissantes du monde : petits pains jaunets, gâteaux aux mille chatoyantes couleurs, fruits dorés, tartes croustillantes, bonbons les plus savamment assortis, petites bouteilles rubicondes au liquide d’argent et d’ambre…

« Vous avez là, disait Lamirande, un député qui vous fait certainement honneur. »

— Ben sûr, répliqua un de ses auditeurs, et m’est avis qu’il sera sûrement élu par acclamation à la prochaine élection.

— C’est ce que le comté devrait faire, répondit l’avocat ; c’est ce qu’il fera. Mansot me parait l’idole ici.

— Croyez-moi ou croyez-moi pas, disait un autre interlocuteur de Lamirande, j’vas vous dire que j’ai toujours été contre M. Mansot ; mais j’commence à en revenir… C’est la faute aussi pas mal à Duchamps qui s’est présenté contre lui à la dernière élection ; il s’est montré envers nous autres, qui avaient travaillé pourtant pour lui jusqu’à en perdre le boire et le manger, il s’est montré, monsieur, une vraie fripouille !…