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CAROLINE POPP


LIÉVINE



Voltaire disait : Donnez-moi les légendes d’un Peuple, et j’écrirai son histoire.

Il n’y a pas dans l’admirable ville de Bruges, une petite maison, une pierre sculptée enchâssée dans un vieux mur, qui n’ait sa légende, au moyen de laquelle on pourrait reconstituer l’histoire poétique de la vieille cité. Le touriste examine avec attention toutes ces choses antiques, il sent que

De tel côté du sol que son pied se dirige,
Il marche sur l’histoire, il remue un prodige.

L’archéologue admire, lui, ces pierres si finement sculptées qu’on dirait de la dentelle pétrifiée ; la découverte d’une petite fenêtre en ogive, dissimulée derrière un bâtiment moderne, le fait pâmer d’aise ; mais c’est au penseur, à celui qui demande aux vieilles demeures le secret de ceux qui les ont habitées, qu’il appartient de révéler les drames ou les joies de famille qui furent l’origine de certaines sculptures, de courtes inscriptions qui figurent sur d’élégantes façades, comme des joyaux au front de la jeune mariée.

Les artistes flamands du moyen-âge avaient l’imagination riche, ingénieuse. On dirait, à voir leurs œuvres, que l’inspiration était à leurs ordres et qu’ils n’avaient qu’à puiser dans un monde invisible ces fleurs capricieusement enroulées, ces fantaisies de la forme que la nature ne présente pas. Leur qualité dominante, c’est l’exubérance, la qualité des forts.

Voilà pourquoi ils imprimèrent à toutes nos vieilles cités un cachet original et durable, et pourquoi les villes comme Bruges, Ypres, Dixmude, Audenarde tentent la curiosité des touristes.

Les personnes qui vont du Parc à la Coupure s’arrêtent souvent, rue des Ciseaux, devant une pauvre petite maison sans fenêtres au rez-de-chaussée et dont le premier étage est soutenu, dans la partie qui surplombe, par une poutre en bois