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considérable par rapport à leur masse. Chaque corpuscule en mouvement représente donc un courant électrique notable. Mais nous savons que les courants électriques présentent une sorte d’inertie spéciale appelée self-induction. Un courant une fois établi tend à se maintenir, et c’est pour cela que quand on veut rompre un courant, en coupant le conducteur qu’il traverse, on voit jaillir une étincelle au point de rupture. Ainsi le courant tend à conserver son intensité de même qu’un corps en mouvement tend à conserver sa vitesse. Donc notre corpuscule cathodique résistera aux causes qui pourraient altérer sa vitesse pour deux raisons : par son inertie proprement dite d’abord, et ensuite par sa self-induction, parce que toute altération de la vitesse serait en même temps une altération du courant correspondant. Le corpuscule — l’électron, comme on dit — aura donc deux inerties : l’inertie mécanique, et l’inertie électromagnétique.

MM. Abraham et Kaufmann, l’un calculateur, l’autre expérimentateur, ont uni leurs efforts pour déterminer la part de l’une et de l’autre. Ils ont été pour cela obligés d’admettre une hypothèse ; ils ont pensé que tous les électrons négatifs sont identiques, qu’ils portent la même charge, essentiellement constante, que les dissemblances que l’on constate entre eux proviennent uniquement des vitesses différentes dont ils sont animés. Quand la vitesse varie, la masse réelle, la masse mécanique, demeure constante, c’est pour ainsi dire sa