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instant donné, dépend de deux choses : son état initial et la loi d’après laquelle cet état varie. Si nous connaissions à la fois cette loi et cet état initial, nous n’aurions plus qu’un problème mathématique à résoudre et nous retomberions sur le premier degré d’ignorance.

Mais il arrive souvent qu’on connaît la loi et qu’on ne connaît pas l’état initial. On demande, par exemple, quelle est la distribution actuelle des petites planètes ; nous savons que, de tout temps, elles ont obéi aux lois de Képler, mais nous ignorons quelle était leur distribution initiale.

Dans la théorie cinétique des gaz, on suppose que les molécules gazeuses suivent des trajectoires rectilignes et obéissent aux lois du choc des corps élastiques ; mais, comme on ne sait rien de leurs vitesses initiales, on ne sait rien de leurs vitesses actuelles.

Seul, le calcul des probabilités permet de prévoir les phénomènes moyens qui résulteront de la combinaison de ces vitesses. C’est là le second degré d’ignorance.

Il est possible, enfin, que non seulement les conditions initiales, mais les lois elles-mêmes, soient inconnues ; on atteint alors le troisième degré de l’ignorance et, généralement, on ne peut plus rien affirmer du tout au sujet de la probabilité d’un phénomène.

Il arrive souvent qu’au lieu de chercher à deviner un événement d’après une connaissance plus ou moins imparfaite de la loi, on connaisse