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bien que la théorie de Lorentz n’est pas un assemblage artificiel destiné à se dissoudre. On devra probablement la modifier, mais non la détruire.

Mais Lorentz n’avait d’autre ambition que d’embrasser dans un même ensemble toute l’optique et l’électro-dynamique des corps en mouvement ; il n’avait pas la prétention d’en donner une explication mécanique. Larmor va plus loin ; conservant la théorie de Lorentz dans ce qu’elle a d’essentiel, il y greffe pour ainsi dire les idées de Mac-Cullagh sur la direction des mouvements de l’éther. Pour lui la vitesse de l’éther aurait même direction et même grandeur que la force magnétique. Cette vitesse nous est donc connue puisque la force magnétique est accessible à l’expérience. Quelque ingénieuse que soit cette tentative, le défaut de la théorie de Lorentz subsiste et même il s’aggrave. L’action n’est pas égale à la réaction. Avec Lorentz, nous ne savions pas quels sont les mouvements de l’éther ; grâce à cette ignorance, nous pouvions les supposer tels que, compensant ceux de la matière, ils rétablissent l’égalité de l’action et de la réaction. Avec Larmor, nous connaissons les mouvements de l’éther et nous pouvons constater que la compensation ne se fait pas.

Si Larmor a à mon sens échoué, cela veut-il dire qu’une explication mécanique est impossible ? Loin de là : j’ai dit plus haut que dès qu’un phénomène obéit aux deux principes de l’énergie et de la moindre action, il comporte une infinité d’explications mécaniques ; il en est donc ainsi des phénomènes optiques et électriques.