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le faire pénétrer au sein des milieux matériels eux-mêmes. L’expérience de Fizeau va plus loin. Par l’interférence des rayons qui ont traversé de l’air ou de l’eau en mouvement, elle semble nous montrer deux milieux différents se pénétrant et pourtant se déplaçant l’un par rapport à l’autre. On croit toucher l’éther du doigt.

On peut concevoir cependant des expériences qui nous le feraient toucher de plus près encore. Supposons que le principe de Newton, de l’égalité de l’action et de la réaction, ne soit plus vrai si on l’applique à la matière seule et qu’on vienne à le constater. La somme géométrique de toutes les forces appliquées à toutes les molécules matérielles ne serait plus nulle. Il faudrait bien, si on ne voulait changer toute la mécanique, introduire l’éther, pour que cette action que la matière paraîtrait subir fût contrebalancée par la réaction de la matière sur quelque chose.

Ou bien encore je suppose que l’on reconnaisse que les phénomènes optiques et électriques sont influencés par le mouvement de la terre. On serait conduit à conclure que ces phénomènes pourraient nous révéler non seulement les mouvements relatifs des corps matériels, mais ce qui semblerait être leurs mouvements absolus. Il faudrait bien encore qu’il y eût un éther, pour que ces soi-disant mouvements absolus ne fussent pas leurs déplacements par rapport à un espace vide, mais leurs déplacements par rapport à quelque chose de concret.