Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 6, 1930.djvu/91

Cette page n’a pas encore été corrigée

pereur d’Allemagne ; mais je constate avec regret que, depuis l’automne dernier, les pangermanistes se remuent beaucoup et font une incessante propagande. Si l’Allemagne devait nous déclarer la guerre, ce serait certes contre la volonté intime de l’empereur, cela prouverait qu’il est débordé par l’opinion publique[1]. » Mais, d’après ce que disait le ministre, j’avais précisé qu’en cas de guerre franco-allemande, le premier geste des Allemands serait d’entrer en Belgique par Aix-la-Chapelle et Liège, et j’avais exprimé le désir que le gouvernement belge prît lui-même quelques mesures de sauvegarde. Rien en tout cela que les événements n’eussent justifié. De mon point de vue personnel, j’aurais donc souhaité la publication. Mais le cabinet s’est demandé si elle ne provoquerait pas certains hommes politiques à reprocher au commandement français de n’avoir pas fait entrer dans le plan XVII une plus large prévision de l’éventualité que, dès 1912, il avait envisagée comme possible. Devant cette objection, je n’ai pas cru devoir insister. Il n’en reste pas moins que si la France a pu pécher, soit par imprévoyance, soit par excès de confiance en la loyauté d’autrui, elle n’a jamais été coupable d’intentions belliqueuses ou d’ambitions impérialistes. Ces lettres du baron Guillaume s’ajoutent à tous les documents qui font foi de notre volonté de paix et elles sont d’autant plus significatives que dans d’autres rapports bruyamment publiés par les Allemands, le ministre belge s’est livré, on le sait, à des appréciations assez fantaisistes, démenties par les faits, comme par l’ensemble de sa correspondance.

  1. Cette opinion était émise avant les conversations de Potsdam entre le roi Albert et Guillaume II. (V. L’Europe sous les armes, p. 329 et s.)