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la vérité, French a, tout autant que Kitchener, la fascination de la mer. Millerand s’est borné à répondre qu’il prendrait l’avis de Joffre, mais qu’il ne pensait pas que le général en chef pût considérer un déplacement de troupes comme possible dès aujourd’hui.

M. Augagneur vient causer avec moi de plusieurs questions qui relèvent de son ministère. Il me dit incidemment qu’il ne croit pas Joffre disposé à confier une armée à Gallieni. Il pense que la meilleure manière de régler la difficulté sans mécontenter Gallieni et sans heurter l’opinion parisienne serait de donner au gouverneur l’intérim de l’ambassade auprès du Quirinal, si Barrère, un peu souffrant depuis quelques jours, prenait un congé pour raisons de santé. Ce serait, ajoute Augagneur, le pendant de l’envoi de Bülow à Rome. « Gallieni, me dit-il, est intelligent, habile, très diplomate. » Et il me montre, dans le Petit Marseillais, une lettre écrite par le gouverneur militaire au compositeur milanais Vanzo et signée : Gallieni, Francese, ma anche ltaliano. Je réponds à Augagneur que, si ingénieuse que soit son idée, Barrère ne me paraît pas assez malade pour s’éloigner de Rome, où il jouit, du reste, d’un grand prestige. Mais la lettre à Vanzo me révèle un Gallieni que je ne connaissais pas.

Le Japon continue à faire la sourde oreille, lorsqu’on le prie d’envoyer des troupes en Europe. Sir Ed. Grey a déclaré à M. Paul Cambon qu’il avait déjà pressenti le gouvernement de Tokyo à ce sujet, qu’il avait essuyé un refus et qu’il ne croyait pas au succès d’une nouvelle démarche1.