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coupés d’Anvers et alors que serait-il arrivé ? Notre armée aurait été tronçonnée, Anvers aurait été investi et nous aurions été dans l’impossibilité de coopérer efficacement à la défense de notre territoire. Actuellement, par suite des dispositions prises, le péril se trouve conjuré ; notre armée n’a pas subi la dislocation qui dans le plan de l’ennemi devait être le résultat du mouvement dirigé contre elle. Au moment opportun, nous pourrons, et j’y suis résolu, reprendre l’offensive. La défense d’Anvers est entre les mains du gouverneur militaire, le général Dufour, un homme très énergique et très allant. La présence du chef d’état-major général n’a plus la même utilité que précédemment. Aussi ai-je décidé ce matin de l’envoyer auprès du maréchal French et du général Joffre, afin de fixer, dans l’ensemble et dans le détail, l’action commune et concertée dont nous sommes convenus et dont nous serons les fidèles observateurs dans l’avenir comme nous l’avons été dans le passé. À Liége nous avons arrêté l’élan des Allemands. Nos forts ont accroché trois corps d’armée. Et lorsque l’ennemi s’est engagé sur la rive gauche de la Meuse, pied à pied, nous lui avons disputé le terrain, à Hasselt, à Dietz, à Tirlemont. Et voici quinze jours que cela dure, quinze jours avec une armée dont tous les éléments ne sont pas d’é6ale valeur, dont les cadres sont incomplets, dans laquelle, pour un soldat qui tient, parce qu’il a quinze années de services, sept fléchissent, non pas par manque de bravoure, mais parce qu’ils sont des combattants improvisés. À Liége, nous avons perdu vingt mille hommes. Nos pertes, particulièrement dans la bataille du 18 août, sont considérables. Or, nos