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deux copies des fameux « verts » de 1911, écrites de la main de M. Calmette. Mes visiteurs me présentent ces dernières pièces, en me disant qu’ils en comprennent trop la gravité pour vouloir les conserver et qu’ils tiennent à me les remettre. J’exprime à MM. Calmette et Marchand ma reconnaissance pour leur démarche et j’accepte de recevoir ces copies, mais à condition d’en informer immédiatement le Président du Conseil, ministre des Affaires étrangères. Je préviens, en effet, M. Doumergue par téléphone.

Précisément, le baron de Schœn est allé le voir et, après l’avoir entretenu de divers sujets, lui a demandé d’un ton détaché : « Qu’est-ce donc que cette affaire de télégrammes verts ? » — « Je ne sais ce dont vous voulez parler. » — « Eh bien ! cette histoire que racontent certains journaux à propos des négociations franco-allemandes de 1911 ? » — « Je ne sais pas. Au ministère, personne n’a compris ce dont il peut s’agir. » À la fin de la conversation, M. Doumergue dit amicalement à l’ambassadeur : « Alors, vous partez bientôt pour le Midi ? » — « Non. Pas encore. Je suis forcé de rester à Paris pour le cas où cette bombe éclaterait. » Ainsi, nous sommes avertis. L’Allemagne a su, dès 1911, par une imprudence de langage facile à préciser, que le quai d’Orsay avait déchiffré ses télégrammes ; elle l’a si bien su qu’elle a changé son chiffre et qu’en 1914, nous ne sommes pas encore parvenus à le retrouver ; elle n’entend pas toutefois que le fait soit divulgué et, s’il l’est, ce sera une explosion qui nous attirera une démarche officielle de l’ambassadeur.

Mais voici une autre bombe et celle-ci, c’est une déposition de Me Maurice Bernard devant la commission