Page:Poincaré - Au service de la France, neuf années de souvenirs, Tome 4, 1927.djvu/166

Cette page n’a pas encore été corrigée

impose Ribot. C’est un défi, une provocation, un petit coup d’État contre le suffrage universel et la souveraineté populaire. »

À la fin de la matinée, M. Ribot me présente ses collègues. Tous maintenant paraissent très confiants. M. Jean Dupuy lui-même cache ses appréhensions. Les décrets sont signés, qui donnent au cabinet la vie et l’espérance.

Dans l’après-midi, je reçois M. Aristide Briand, qui me prie de m’arrêter à Saint-Chamond, sa circonscription électorale, lorsque j’irai prochainement dans le département de la Loire. Nous échangeons quelques mots sur la situation. Il me dit qu’il était d’abord favorable à un ministère Viviani, mais il trouve que M. Viviani a péché par inexpérience et par faiblesse. Puisqu’un cabinet Ribot s’est maintenant formé, il faut le faire vivre, et M. Briand croit que ce n’est pas chose impossible.

Tandis que sénateurs et députés se livrent à des pronostics contradictoires sur le sort du gouvernement, je cherche, une fois de plus, à tromper mes ennuis et je préside, à la Maison des étudiants, un joyeux banquet de l’Association générale. L’accueil de ces jeunes gens est tel qu’il me console de toutes les tristesses et me venge de toutes les injures.

Le jeudi 11, lente journée d’expectative. La Chambre ne siège pas. Les ministres s’installent. Mais le vendredi matin, le premier conseil se tient à l’Élysée. Pour se fortifier sur sa gauche, le cabinet s’est adjoint des sous-secrétaires d’État radicaux, MM. Guernier, Margaine, Le Cherpy. MM. Ribot et Clementel exposent la situation de la trésorerie, qui est franchement mauvaise. Il est urgent