Si donc se parler à soi-même est juger, il n’est personne qui, parlant et jugeant de deux objets à la fois et les appréhendant tous deux par la pensée, puisse dire et juger que l’un est l’autre. Il faut aussi que tu me passes mon expression : l’un est l’autre. Voici ce que je veux dire par là : c’est que personne ne juge que le laid est beau, ni rien de semblable.
Eh bien, Socrate, je te la passe et il me paraît que tu as raison.
Ainsi, il est impossible qu’en pensant aux deux objets à la fois, on juge que l’un est l’autre.
Il le semble.
D’un autre côté, si l’on ne pense qu’à l’un des deux et pas du tout à l’autre, on ne jugera jamais que l’un est l’autre.
C’est vrai ; autrement, il faudrait avoir présent à la pensée l’objet même auquel on ne pense pas.
Ainsi donc, soit qu’on pense aux deux, soit qu’on ne pense qu’à un, il est impossible de prendre l’un pour l’autre. Par conséquent, définir l’opinion fausse comme une confusion avec un autre objet, c’est ne rien dire ; car ni cette définition, ni les précédentes ne font apparaître en nous d’opinion fausse.
Il semble que non.
XXXIII. — Cependant, Théétète, si nous ne prouvons pas que cette opinion fausse existe, nous serons forcés d’admettre beaucoup d’absurdités.
Quelles absurdités ?
Je ne te les dirai pas que je n’aie essayé de considérer la question sous toutes ses faces. J’aurais honte pour