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THÉODORE

C’est exact.

SOCRATE

Donc, puisqu’elle est contestée par tout le monde, la vérité de Protagoras n’est vraie pour personne, ni pour tout autre que lui, ni pour lui.

THÉODORE

Nous mettons trop d’acharnement, Socrate, à traquer mon ami.

SOCRATE

Je ne vois pas, ami, que nous dépassions la juste mesure. Il y a naturellement apparence qu’étant plus âgé, il soit plus sage que nous, et si, à ce moment, il sortait de terre jusqu’au cou, il est probable qu’il me reprocherait d’avoir dit plus d’une sottise et à toi de les approuver, après quoi il rentrerait sous terre et disparaîtrait précipitamment. Mais nous, je pense, nous sommes bien forcés de faire ce que notre nature nous commande et de dire toujours ce qui nous paraît vrai. Et maintenant encore ne devons-nous pas affirmer que tout le monde indistinctement est d’accord sur ce point, qu’il y a des gens plus sages que d’autres et qu’il y en a de plus ignorants ?

THÉODORE

C’est en tout cas mon avis.

SOCRATE

XXIII. — Ne dirons-nous pas aussi que la doctrine de Protagoras trouve son point d’appui le plus ferme dans ce que nous avons indiqué pour le défendre, à savoir que la plupart des choses, chaleur, sécheresse, douceur et autres qualités du même genre, sont pour chacun ce qu’elles lui paraissent. Mais si Protagoras admet qu’en certains cas un homme l’emporte sur un autre, en matière de santé et de maladie, ne consentira-t-il pas à admettre qu’il n’est pas à la portée de la première femmelette venue, d’un gamin, d’une bête, de se guérir eux-mêmes par la connaissance de ce qui leur est salutaire, mais que s’il est des cas où un homme est supérieur à un autre, c’est bien dans celui-ci ?

THÉODORE

Pour ma part, je suis de ton avis.

SOCRATE

En politique aussi, ce qui est beau ou laid, juste ou injuste, pie ou impie est véritablement pour chaque cité