à ce que Protagoras disait tout à l’heure et au reproche qu’il nous a fait de disputer contre un enfant et de profiter de sa timidité pour combattre sa doctrine. Il a traité cela de badinage, et, vantant sa mesure de toutes choses, il nous a recommandé d’examiner sérieusement sa propre thèse.
Certainement, Socrate, j’y ai pris garde.
Eh bien, veux-ru que nous lui obéissions ?
De tout mon coeur.
Or tu vois que tous ceux qui sont ici, excepté toi, ne sont que des enfants. Si donc nous voulons lui obéir, il faut que, questionnant et répondant tour à tour, toi et moi, nous examinions sérieusement sa thèse, afin qu’il ne nous reproche pas de l’avoir encore discutée en nous jouant avec des enfants.
Eh bien, est-ce que Théétète ne te suivra pas mieux dans cet examen que beaucoup de gens qui portent de grandes barbes ?
Pas mieux que toi en tout cas, Théodore. Ne te figure donc pas que je doive, moi, faire tous mes efforts pour défendre feu ton camarade, et toi aucun. Allons, mon excellent Théodore, suis-moi un moment, juste jusqu’à ce que nous voyions si l’on doit te prendre pour mesure en fait de figures géométriques, ou si tous les hommes sont aussi compétents que toi en astronomie et dans les autres sciences où tu as la réputation d’exceller.
Il n’est pas facile, Socrate, quand on est assis près de toi, de se défendre de te donner la réplique, et tout à l’heure j’ai parlé à la légère en disant que tu me permettrais de ne pas me dévêtir et que tu ne m’y contraindrais pas, comme les Lacédémoniens. Il me paraît, au contraire, que tu te rapproches plutôt de Sciron[1]. Les Lacédémoniens en effet vous enjoignent de vous retirer ou de vous déshabiller ; mais toi, ce me semble, c’est plutôt comme Antée[2]