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agréable. Toute impression douce et graduelle est insensible, et l’impression contraire a des effets contraires. L’impression qui se produit avec aisance est sensible au plus haut degré, mais ne comporte ni douleur ni plaisir. Telles sont les impressions qui se rapportent au rayon visuel lui-même, qui, nous l’avons dit plus haut, forme pendant le jour un corps intimement uni au nôtre. Ni coupures, ni brûlures, ni aucune autre affection ne lui font éprouver aucune douleur, et il ne ressent pas non plus de plaisir en revenant à sa forme primitive, bien qu’il nous donne des perceptions très vives et très claires, selon les impressions qu’il subit et les corps qu’il peut rencontrer et toucher lui-même. C’est qu’il n’y a pas du tout de violence dans sa division ni dans sa concentration. Au contraire, les corps composés de plus grosses parties, cédant avec peine à l’agent qui agit sur eux et transmettant l’impulsion reçue à l’animal tout entier, déterminent des plaisirs et des peines, des peines quand ils éprouvent une altération, des plaisirs quand ils reviennent à leur état normal. Tous les organes qui perdent de leur substance et se vident graduellement, mais qui se remplissent tout d’un coup et abondamment, sont insensibles à l’évacuation, mais deviennent sensibles à la réplétion ; aussi ne causent-ils point de douleurs à la partie mortelle de l’âme, mais ils lui procurent de grands plaisirs. C’est ce qui paraît manifestement à propos des bonnes odeurs. Mais quand les organes s’altèrent tout d’un coup et reviennent à leur premier état petit à petit et avec peine, ils donnent toujours des impressions contraires aux précédentes, comme on peut le voir dans les brûlures et les coupures du corps.

Nous avons à peu près expliqué les affections communes à tout le corps et les noms qui ont été donnés aux agents qui les produisent. Il faut essayer maintenant d’expliquer, si tant est que nous en soyons capables, les affections qui se produisent dans les parties spéciales de notre corps et aussi les causes qui les font naître.

Il faut en premier lieu mettre en lumière du mieux que nous pourrons ce que nous avons omis ci-dessus en parlant des saveurs, à savoir les impressions propres à la langue. Or ces impressions, comme la plupart des autres, paraissent résulter de certaines contractions et de certaines divisions, mais aussi dépendre plus que les autres des qualités rugueuses ou lisses du corps. En effet, toutes les fois que des particules terreuses, entrant dans les petites veines qui s’étendent jusqu’au coeur et qui servent à la langue pour apprécier les saveurs, viennent en contact avec les portions humides et molles de la chair, et s’y liquéfient, elles contractent les petites veines et les dessèchent, et nous paraissent âpres, si elles sont plus rugueuses, aigres, si elles le sont moins.

Les substances qui rincent ces petites veines et nettoient