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L’ÉTRANGER

Mais, dans une cité de mille hommes, est-il possible que cent d’entre eux ou même cinquante la possèdent dans une mesure suffisante ?

SOCRATE LE JEUNE

A ce compte, ce serait le plus facile de tous les arts. Nous savons bien que, sur mille hommes, on ne trouverait jamais un pareil nombre de joueurs de trictrac supérieurs à tous ceux que renferme la Grèce, encore moins un pareil nombre de rois. Car l’homme qui possède la science royale, qu’il règne ou non, a droit, d’après ce que nous avons dit, à être appelé roi.

L’ÉTRANGER

Tu fais bien de me le rappeler. Il suit de là, si je ne me trompe, que le gouvernement véritable, s’il en existe un de tel, doit être cherché dans un seul, ou dans deux, ou dans un tout petit nombre d’hommes.

SOCRATE LE JEUNE

Sans contredit.

L’ÉTRANGER

Mais ceux-là, qu’ils commandent avec ou sans le consentement de leurs sujets, selon des lois écrites ou sans elles, et qu’ils soient riches ou pauvres, il faut croire, comme nous le pensons maintenant, qu’ils gouvernent suivant un certain art. Il en est absolument de même des médecins : qu’ils nous guérissent avec ou sans notre consentement, en nous taillant, nous brûlant ou nous faisant souffrir de quelque autre manière, qu’ils suivent des règles écrites ou s’en dispensent, qu’ils soient pauvres ou riches, quel que soit le cas, nous ne les en tenons pas moins pour médecins, tant qu’ils nous régentent avec art, qu’ils nous purgent ou nous amaigrissent d’une autre manière, ou nous font engraisser, pourvu que ce soit pour le bien de notre corps et pour le rendre meilleur, de pire qu’il était, et que leur traitement sauve toujours les malades qu’ils soignent. C’est en la définissant de cette manière, j’en suis persuadé, et de cette manière seulement, que nous pourrons affirmer que nous tenons la seule définition juste de la médecine, comme de tout autre art de commander.

SOCRATE LE JEUNE

Certainement.

L’ÉTRANGER

XXXIII. — C’est donc, semble-t-il, une conséquence forcée que, parmi les gouvernements, celui-là s