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qu’il s’appelait Agathon, et je ne serais pas étonné qu’il fût le mignon de Pausanias ; il y avait donc cet adolescent, et les deux Adimantes, l’un, fils de Képis, et l’autre, de Leucolophide, et quelques autres. Pour le sujet de leur entretien, je n’ai pu, du dehors où j’étais, le saisir, malgré mon vif désir d’entendre Prodicos, qui me paraît être un sage accompli, un homme divin : sa voix de basse-taille, résonnant dans la chambre, arrivait en sons indistincts. A peine étions-nous entrés qu’entraient derrière nous Alcibiade le beau, comme tu dis, avec raison, selon moi, et Critias, fils de Kallaischros.

VIII. — Pour nous, après avoir franchi la porte, nous avons passé quelques instants à regarder ce tableau ; puis nous nous sommes avancés vers Protagoras et je lui ai dit : C’est toi que nous cherchons, Protagoras, Hippocrate que voici et moi.

— Voulez-vous me parler en particulier ou en présence de tout le monde ?

— Cela nous est égal à nous, mais écoute ce qui nous amène et vois toi-même.

— Qu’est-ce donc qui vous amène ?

— Hippocrate que voici est d’Athènes, fils d’Apollodore, d’une maison considérable et opulente ; personnellement il paraît aussi bien doué qu’aucun jeune homme de son âge ; il aspire, je crois, à tenir un rang illustre dans l’État, et il croit que le meilleur moyen d’y réussir est de prendre tes leçons ; vois maintenant s’il te convient de nous entretenir là-dessus en particulier ou devant les autres.

— C’est bien fait à toi, Socrate, de veiller avec cette prévoyance à mes intérêts ; car un étranger qui vient dans de grandes villes pour y persuader à l’élite des jeunes gens de quitter toute autre société de parents et d’étrangers, soit vieux, soit jeunes, pour s’attacher à lui, afin de devenir meilleurs par son commerce, un étranger qui fait cela doit user de circonspection ; car c’est un métier qui soulève contre lui des jalousies, des haines et des embûches redoutables.

Pour moi, j’ose affirmer que la profession de sophiste est ancienne ; mais ceux qui la pratiquaient dans les premiers temps, craignant la défaveur qui s’y attache, la pratiquaient sous le déguisement ou le voile de la poésie, comme Homère, Hésiode, Simonide, ou des mystères et des oracles, comme Orphée, Musée et leurs disciples ; j’ai remarqué que quelques-uns même l’abritaient derrière la gymnastique, comme Ikkos de Tarente et cet Hérodicos de Sélymbrie, originaire de Mégare, sophiste encore vivant, qui ne craint aucun rival ; c’est sous le manteau de la musique que votre Agathoclès, ce grand sophiste, s’est caché, ainsi que Pythoclidès de Céos et beaucoup d’autres. Tous ces gens-là, je le