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THÉAGÈS

Théagès. — Oui.

Socrate. — Et Périandre[1], fils de Cypsèle ? Il gouvernait à Corinthe. Ne l’as-tu pas entendu dire ?

Théagès. — Si certes.

Socrate. — Et ce sont toujours ces gens-là qu’il gouvernait dans sa ville ?

dThéagès. — Oui.

Socrate. — Et Archélaos[2], fils de Perdiccas, qui commande depuis peu la Macédoine, ne crois-tu pas qu’il gouverne ces mêmes individus ?

Théagès. — Je le crois.

Socrate. — Et Hippias[3], fils de Pisistrate, qui a gouverné ici même, sur qui, penses-tu, s’étendait son gouvernement ? Sur ceux-là aussi, n’est-ce pas ?

Théagès. — Évidemment.

Socrate. — Pourrais-tu me dire quel est le nom qu’on donne à Bacis, à Sibylle[4] et à notre Amphilytos ?[5]

Théagès. — Quel autre, Socrate, que celui de devins ?

eSocrate. — Tu dis vrai. Mais pour ceux-ci maintenant, tâche de répondre de même ; quel nom vaut à Hippias et à Périandre le gouvernement qu’ils exercent ?

Théagès. — Celui de tyrans, je suppose. Quel autre, en effet ?

Socrate. — Donc quiconque désire gouverner tous les hommes de la cité, ne désire-t-il pas le même gouvernement que ces derniers, le gouvernement tyrannique, et ne veut-il pas être tyran ?

Théagès. — Il le paraît.

Socrate. — Voilà donc ce que tu affirmes désirer ?

Théagès. — Apparemment, d’après mes paroles.

Socrate. — Mauvais sujet ! C’est donc le désir de devenir notre tyran 125qui t’inspirait depuis longtemps les reproches

  1. Périandre est compté parmi les sept sages de la Grèce, au moins dans un grand nombre de listes (cf. Diels, Die Fragm. der Vorsok., II, 73a).
  2. Sur Archélaos, cf. Alcibiade II, 141 d, note.
  3. Sur Hippias, cf. le dialogue Hipparque.
  4. Les noms de Bacis et Sibylle ne désignent pas un individu, mais une classe de personnages inspirés. Cf. pseudo-Aristote, Problemata, 30 A, 8954 a, 36. Βάκις était un surnom de Pisistrate. Voir Rohde, Psyché II, p. 63 et suiv.
  5. Amphilytos d’Acarnanie, contemporain d’Onomacrite. Hérodote