Socrate. — Eh bien ! celle que tu désires présentement, n’a-t-elle point de nom, ou en a-t-elle un ?
Théagès. — À mon avis, elle en a un.
Socrate. — Mais alors la connais-tu sans connaître son nom, ou sais-tu également le nom ?
Théagès. — Le nom également.
Socrate. — Quel est-il ? Parle.
dThéagès. — Mais quel autre nom pourrait-on lui donner, Socrate, sinon celui de science ?
Socrate. — L’art de conduire les chevaux n’est-ce pas aussi une science ? Serait-ce, d’après toi, une ignorance ?
Théagès. — Évidemment non.
Socrate. — C’est donc une science ?
Théagès. — Oui,
Socrate. — À quoi nous sert-elle ? Ne nous apprend-elle pas à gouverner un attelage ?[1]
Théagès. — Oui.
Socrate. — Et l’art du pilote, n’est-ce pas une science aussi ?
Théagès. — Je le crois bien.
Socrate. — N’est-ce point elle qui nous apprend à gouverner des vaisseaux ?
Théagès. — Oui, elle-même.
Socrate. — Eh bien ! celle que tu désires, quelle science est-elle ? Que nous apprend-elle à gouverner ?
eThéagès. — À mon avis, ce sont les hommes.
Socrate. — Les malades ?
Théagès. — Non pas.
Socrate. — C’est, en effet, le rôle de la médecine, n’est-ce pas ?
Théagès. — Oui.
Socrate. — Mais saurions-nous gouverner par elle les chœurs de chanteurs ?
Théagès. — Non.
Socrate. — C’est, en effet, le rôle de la musique.
Théagès. — Parfaitement.
- ↑ Tout ce passage, jusqu’à 124 c, est un remaniement et une adaptation d’Alcibiade I, 126 b, c, d. Les exemples sont identiques : exemples du cocher, du pilote, des malades, des chefs de chœurs, des moissonneurs… et la terminologie elle-même se ressent en très grande partie du procédé d’imitation. Voir notice, p. 139.