et qu’il convienne au rhapsode et d’examiner et de juger, de préférence aux autres hommes.
Ion. — Je le déclare, Socrate : tous sans exception.
Socrate. — Ce n’est pas toi, Ion, qui dis : tous sans exception. As-tu si peu de mémoire ? Pourtant le défaut de mémoire siérait mal à un rhapsode de profession.
Ion. — En quoi donc 540 manqué-je de mémoire ?
Socrate. — Ne te souviens-tu pas d’avoir dit[1] que l’art du rhapsode diffère de celui du cocher ?
Ion. — Je m’en souviens.
Socrate. — Puisqu’il en diffère, tu convenais donc aussi que ses connaissances seront différentes ?
Ion. — Oui.
Socrate. — Ce n’est donc pas à tout que s’étendront, d’après toi, les connaissances de l’art rhapsodique ni celles du rhapsode.
Ion. — Si, sauf peut-être aux cas de ce genre[2].
Socrate. — Par « cas de ce genre » b tu veux dire : sauf ce qui appartient aux autres arts, à peu près[3]. Mais alors, quelle sorte de choses connaîtra le tien, puisqu’il ne connaît pas tout ?
Ion. — Selon moi, le langage qui convient à un homme comme à une femme, à un esclave comme à un homme libre, à un subalterne comme à un chef.
Socrate. — Veux-tu dire que le langage convenable à qui gouverne en mer un vaisseau battu par la tempête, le rhapsode le connaîtra mieux que le pilote ?
Ion. — Non, celui-là, ce sera le pilote.
Socrate. — Mais le langage c convenable à qui gouverne un malade, le rhapsode le connaîtra-t-il mieux que le médecin ?
Ion. — Celui-là non plus.
Socrate. — Veux-tu dire celui qui convient à un esclave ?
Ion. — Oui.
Socrate. — Par exemple, d’après toi, le langage que doit
- ↑ 538 b.
- ↑ Les cas spéciaux dont on a parlé (l’art du cocher, celui du médecin, etc., voir 539 de). Pour Ion ils sont peu importants.
- ↑ Πλὴν τὰ τῶν ἀλλῶν τεχνῶν σχεδόν τι commente τὰ τοιαῦτα. Mot à mot : « Tu dis : (sauf) les cas de ce genre, c’est-à-dire : sauf ce qui concerne à peu près les autres arts (autres que celui du rhapsode) ».