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PHÉDON

lorsqu’en bas les voies d’écoulement sont moins pleines, elles le sont davantage en haut, et réciproquement. En résumé, tout ce que nous ou nos semblables voyons couler (sources et fleuves), ou s’arrêter de couler pour former dans des creux plus vastes des bassins de stagnation (lacs et mers), tout cela correspond à une disposition analogue des profondeurs invisibles de la terre, et en provient. À la vérité il ne s’agit sans doute que de l’état actuel des choses ; car l’existence même de la masse d’eau centrale suppose à l’origine le dépôt de l’air et des vapeurs aqueuses abandonnées par l’éther. Du moins y a-t-il toujours actuellement (et bien que parmi les courants les uns soient plus intérieurs et d’autres plus extérieurs) correspondance et communication entre ce qu’improprement nous nommons la surface et ce que, moins improprement, nous nommons le fond. Il s’ensuit enfin, semble-t-il, que l’exposition de Platon ne concerne pas du tout un mouvement des courants d’un hémisphère à l’autre, et encore moins, comme le disent unanimement les commentateurs, d’un hémisphère Nord à un hémisphère Sud, mais la relation de ce mouvement entre les parties invisibles et les parties visibles d’une terre sphérique, qui autour de son centre a la masse d’eau du Tartare.

2o Plus spéciale, la deuxième question (112 a-113 c) est de savoir quels sont les divers courants, leurs caractères propres, leur trajet. Il y en a beaucoup et de très grands, dont chacun a son bassin de stagnation ou sa mer. C’est au moins le cas pour les quatre que Platon s’est contenté de nommer. Étant donné en outre que les caractères propres d’un fleuve dépendent des terrains qu’il traverse, on pourra, dans la mesure où l’on connaît ceux-ci, en induire la nature du sol sur le trajet de chaque fleuve : c’est ce que Platon paraît avoir voulu faire pour deux d’entre eux, le fleuve de feu et le fleuve de glace. En cela sa géographie n’est peut-être pas d’ailleurs une conception entièrement arbitraire (cf. p. 95, n. 1 et 2).

Le premier des grands fleuves de la terre est le fleuve Océan. De tous c’est le plus grand et celui qui décrit le cercle le plus extérieur : par quoi il faut sans doute entendre le circuit le plus superficiel et le plus distant du centre. Il est le seul dont le bassin de stagnation ne soit pas nommé et sans doute n’est-ce pas la Méditerranée seulement ; il existe en effet d’autres habitats humains disposés, comme celui que