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PHÉDON

cesse d’exister. — Personne assurément, par Zeus ! dit Cébès, ni des hommes, ni à plus forte raison, si je m’en crois, des Dieux ! — Du moment donc que l’Immortel ne peut, de plus, être anéanti, l’Âme, à qui précisément il appartient de n’être pas mortelle, e se peut-il qu’elle ne soit pas, de plus, indestructible ? — C’est de toute nécessité. — Quand, par suite, la Mort survient à l’homme, c’est vraisemblablement ce qu’il y a de mortel en lui qui meurt, tandis que ce qu’il a d’immortel s’en va de son côté, sauvegardé de l’anéantissement et cédant la place à la Mort[1]. — C’est évident. — Plus que tout, par suite, Cébès, l’Âme est chose non-mortelle et qui ne peut être anéantie, dit Socrate ; 107 c’est donc réellement que nos âmes à nous existeront dans les demeures d’Hadès.


Caractère des arguments présentés :
conséquences morales.

— Assurément, dit Cébès, je n’ai quant à moi, Socrate, après cela rien d’autre à ajouter, ni aucun sujet de défiance à l’égard de ces raisonnements. S’il y a pourtant quelque chose que Simmias ici présent, ou tout autre, trouvent à dire, ils feront bien de ne pas garder le silence. Je me demande en effet s’il est une autre occasion, hors celle qui s’offre à présent, où l’on pourrait renvoyer l’intention de parler ou d’entendre parler de semblables questions ! — Eh bien, non ! répliqua Simmias, je n’ai plus, pour ma part aussi, sujet d’être en défiance, au moins par rapport aux raisons alléguées. La grandeur, toutefois, du problème que nous traitons, le mépris que j’ai pour l’humaine faiblesse, b me contraignent à garder en mon for intérieur quelque défiance à l’égard de ces thèses. — Ce n’est pas cela seulement, Simmias, dit Socrate. Mais la justesse de tes paroles s’étend aussi à nos prémisses : quelque croyables que celles-ci soient pour vous, elles n’en méritent pas moins un examen plus assuré[2]. Oui, à condition que vous les distinguiez avec toute la précision

    -mortel est par définition indestructible (105 e-106 b). Donc l’âme (deuxième conclusion) est par là même indestructible.

  1. C’est le second cas de la loi des contraires : cf. p. 77, n. 2.
  2. Nul doute sur la rigueur du raisonnement ; mais peut-être l’analyse des postulats n’a-t-elle pas été poussée assez loin (cf. 101 d fin).