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APOLOGIE DE SOCRATE




PREMIÈRE PARTIE

PLAIDOYER DE SOCRATE


Quelques observations préalables.

17

Je ne sais trop, Athéniens, quel effet mes accusateurs ont pu produire sur vous. Pour moi, en les écoutant, j’ai failli oublier qui je suis, tant leurs discours étaient persuasifs. Et pourtant, sans exagérer, ils n’ont pas dit un seul mot de vrai. Mais, parmi tant d’inventions, voici ce qui m’a le plus étonné : c’est qu’ils vous aient prévenus d’être sur vos gardes et de ne pas vous laisser tromper par moi, en me représentant comme un discoureur habile. b Vraiment, pour s’exposer ainsi sans honte à se faire immédiatement convaincre de mensonge, quand j’allais me montrer absolument incapable de bien parler, quelle impudence ne faut-il pas ! À moins, peut-être, qu’ils n’appellent habile à parler quiconque dit la vérité. S’ils l’entendent ainsi, je conviendrais alors que je suis orateur ; seulement, ce ne serait pas à leur manière.

En tout cas, je le répète, ils n’ont rien dit, ou presque rien, qui soit vrai. Moi, au contraire, je ne vous dirai que la vérité. Oh ! par Zeus, ce ne sera pas, Athéniens, en un langage exquis comme le leur, c tout enjolivé de noms et de verbes élégants et savamment agencés. Non, je parlerai tant bien que mal, comme les expressions viendront à moi. Tout ce que j’ai à dire est juste, voilà de quoi je suis sûr. N’attendez pas de moi autre chose. Il serait par trop malséant, juges, qu’un