Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome I.djvu/20

Cette page a été validée par deux contributeurs.
12
INTRODUCTION

ment, ou quelquefois imaginé après coup, certains groupements de dialogues par trois ou par quatre (le Théétète, le Sophiste, le Politique, le Philosophe, ce dernier projeté, non composé ; ou encore République, Timée, Critias, et un dialogue qui est resté à l’état de projet). On s’inspira de cette suggestion, mal comprise d’ailleurs. C’est ainsi qu’au second siècle avant notre ère, Aristophane de Byzance distribua l’œuvre de Platon en trilogies. Plus tard, d’autres critiques, Derkylidas au temps de César, et Thrasylle, contemporain de Tibère, la répartirent par groupes de quatre dialogues, en tétralogies. C’est ce classement qui nous a été transmis par les manuscrits du Moyen âge, et les éditeurs modernes l’ont généralement conservé par respect pour la tradition.

Il a le défaut capital de faire obstacle à une étude méthodique. Sous une apparence d’ordre, c’est le désordre organisé. Les œuvres les plus disparates sont ainsi rapprochées au hasard, sans qu’il soit possible d’en saisir la liaison. Rien n’est plus gênant pour qui veut suivre de près la pensée du philosophe et se faire quelque idée des changements qu’elle a subis. Aussi, dans les écoles platoniciennes de l’antiquité, avait-on imaginé d’indiquer dans quel ordre les dialogues devaient être lus, sans tenir compte du classement des manuscrits. Mais sur cet ordre même, les indications différaient suivant le but qu’on proposait aux lecteurs. D’ailleurs, il s’agissait toujours de les soumettre à une sorte d’initiation progressive : en aucun cas, on ne se préoccupait de les aider à suivre l’évolution réelle de la doctrine du maître. L’esprit historique n’exerçait alors aucune influence[1].

De nos jours, il paraît indispensable de procéder au-

  1. Voir, par exemple, l’ordre de lecture proposé par Olympiodore, Prolegomena, 26 Hermann et Albinos, Prol. 4, même édition.