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Du choc d’un autre mot, chaque mot retentit,
Et, d’un trait lumineux, chaque son m’avertit.

Mais quoi ! j’entends déjà fronder notre idiôme.
Des pédans, nés romains au sein de ce royaume,
M’ont crié tout à coup : « Jeune homme, que veux-tu ?
« Retourne sur tes pas, suis le sentier battu.
« Dans ses combinaisons notre langue est captive,
« Elle n’a jamais eu de force imitative,
« Son nerf vient se briser contre ses E muets,
« Et Phébus est sans lyre au Parnasse Français... »
Non : je n’écoute point vos décrets ridicules ;
Je veux, entre vos mains, écraser vos férules.
Louez le tems passé, si c’est votre destin,
Dînez s’il faut, de grec, et soupez de latin ;
Mais aux mânes plaintifs de ces deux langues-mères
Ne sacrifiez pas la langue de mes pères ;
Ses torts sont effacés : j’ai dans la nuit des tems,
Vu briller, par degrés, ses progrès éclatans,
Et, notre Académie, au travers de son crible,
Sassant jadis des Goths le jargon corruptible,
Nous prodiguer depuis, dans un code épuré,
Les précieux trésors d’un langage assuré.