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VOYAGES

toute arme, un arc, des flèches et un bâton pointu ; ils parcourent les plaines incultes à la recherche des fourmis et des sauterelles, dont ils se nourrissent, et ils croient faire un festin quand ils rencontrent quelques racines insipides, ou quelques baies nauséabondes. Des personnes respectables et dignes de foi m’ont assuré qu’ils se repaissent des cadavres de leurs proches et qu’ils mangent même quelquefois leurs propres enfants. On ne connaît pas leur nombre ; car ils ne sont guère que deux, trois ou quatre ensemble. Ils sont si timides qu’un étranger aurait bien de la peine à les aborder. Dès qu’ils en aperçoivent un, soit blanc, soit sauvage, ils donnent l’alarme en allumant un feu de bois ; un instant après, le même signal se multiplie dans tous les endroits où ils sont campés. On en a compté plus de quatre cents à la fois, qui, à ce signal, couraient se cacher au milieu de roches inaccessibles ; ce qui fait présumer qu’ils sont très-nombreux. Lorsqu’ils vont à la recherche des racines et des fourmis, ils cachent leurs petits enfants dans les herbes ou dans les trous des rochers. Quelques-uns de temps en temps se hasardent à quitter leurs cachettes, viennent trouver les blancs, et leur vendent leurs enfants pour des bagatelles. Les Espagnols de la Californie font quelquefois des incursions dans leur pays pour enlever les enfants. On m’a assuré qu’ils les traitent avec humanité, qu’ils les instruisent dans la religion, et que, lorsqu’ils sont parvenus à un certain âge, ils