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VOYAGES

bouts les perches qui la supportent, et brûlent tout son avoir à la fois. Le cadavre est garrotté sur son coursier favori et conduit sur le bord de la rivière voisine. Là, les guerriers poursuivent l’animal, et le cernent de près en jetant des cris si affreux, qu’ils le forcent à s’élancer dans le courant avec le corps de son maître. Alors redoublant leurs cris, ils recommandent au cheval de transporter sans délai son maître au pays des âmes. Ce n’est pas tout. Pour témoigner leur douleur, ils se font des incisions sur toutes les parties charnues du corps ; et plus l’attachement au défunt est grand, plus les incisions qu’ils se font sont profondes. On m’a assuré qu’ils prétendent que la douleur s’échappe par ces plaies. Croiriez-vous que ces mêmes gens, si sensibles à la mort d’un parent, ont, comme les Sioux, les Pawnees, et la plupart des nations nomades, la coutume barbare d’abandonner sans pitié aux bêtes féroces du désert les vieillards et les malades, dès qu’ils commencent à leur causer de l’embarras dans leurs expéditions de chasse ?

Tandis que je me trouvais dans leur camp, les Serpents se préparaient à une expédition contre les Pieds-Noirs. Aussitôt que le chef eut annoncé à tous les jeunes guerriers sa résolution de porter la guerre sur les terres de l’ennemi, tous ceux qui se proposaient de le suivre préparèrent leurs munitions, chaussures, arcs et flèches. La veille du départ, le chef, à la tête de ses soldats, fit sa danse