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VOYAGES

de bouffées. Alors le chef m’embrassa et me souhaita le bonjour en me disant : « Robe-Noire, mon cœur a tressailli de joie lorsque j’ai appris qui vous étiez. Ma loge n’a jamais eu de jour plus grand ; dès que j’eus reçu la nouvelle de votre arrivée, j’ai fait remplir ma grande chaudière pour vous fêter au milieu de mes braves. Soyez le bienvenu. J’ai fait tuer en votre honneur mes trois meilleurs chiens, ils étaient gras à pleine peau. » Ne vous étonnez pas si je vous dis que c’est là leur plus grand festin, et que la chair de chien sauvage est très-délicate et fort bonne ; elle ressemble beaucoup à celle d’un petit cochon. La portion qu’on m’accorda était grande : les deux cuisses et les pattes avec cinq ou six côtes ; la loi du festin ordonnait de tout manger, je n’en pouvais venir à bout. Enfin j’appris qu’on pouvait se débarrasser de son plat en l’avançant à un autre convive, avec un présent de tabac.

Je pris de là occasion de leur parler des principaux points de la Religion ; je leur expliquai les dix commandements de Dieu et plusieurs articles du Symbole. Je leur fis connaître l’objet de mon voyage aux montagnes, leur demandant, si eux aussi ne désireraient pas d’avoir des Robes-Noires parmi eux, pour apprendre à leurs enfants à connaître et à servir le Grand-Esprit. La proposition parut leur plaire beaucoup, et ils me répondirent qu’ils feraient leur possible pour rendre le séjour des Robes-Noires agréable parmi eux. Je crois