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VOYAGES

je quittai Saint-Louis, le 27 mars 1840, dans un bateau à vapeur, et je remontai le Missouri à une distance de cinq cents milles, pour me rendre aux frontières de l’État. Le navire où j’étais embarqué se trouvait (comme ils le sont tous dans ce pays où l’émigration et le commerce ont pris une si grande extension) encombré de marchandises et de passagers de tous les États de l’Union ; je puis même dire de différentes nations de la terre, blancs, noirs, jaunes et rouges avec les nuances de toutes ces couleurs. Le bateau ressemblait à une petite Babel flottante, à cause des différents idiomes et jargons qu’on y entendait. Ces passagers débarquent pour la plupart sur l’une et l’autre rive, pour y établir des fermes, construire clés moulins, ériger des fabriques de toute espèce ; ils augmentent de jour en jour le nombre des habitants des petites villes et des villages qui s’élèvent comme par enchantement sur les deux rives.

À mesure que l’on remonte la rivière, on trouve le pays charmant et rempli d’intérêt, diversifié par des rochers à pic et des coteaux d’argile très-élevés et souvent entrecoupés. Les bas-fonds présentent à l’œil une grande variété d’arbres et d’arbrisseaux, des chênes et des noyers de douze différentes espèces ; le sassafras et l’acacia triacanthos dont les fleurs embaument l’air de leurs délicieux parfums ; l’érable qui le premier s’enveloppe de la livrée du printemps. Le sycomore, platanus occidentalis, roi de la forêt de l’ouest,