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CHEZ LES TRIBUS INDIENNES

petit sentier par monts et vallées, par forêts et prairies, le long de la rivière Skarrameep. Vers le soir nous nous trouvâmes sur le bord d’un torrent profond et impétueux, ayant pour tout pont un arbre assez léger auquel les eaux imprimaient un mouvement continuel. Ce pont ressemblait beaucoup au Pont des âmes dont parlent les traditions des Potowatomies. Ces sauvages croient que les âmes doivent le traverser avant de se rendre à leur Élysée ; les bons, disent-ils, le passent sans peine, mais les méchants sont incapables de s’y tenir debout : ils chancellent et tombent, et le torrent les emporte dans un labyrinthe de marais et de lacs, où, tristes et malheureux, tourmentés par la faim et les angoisses, exposés à toutes sortes de reptiles venimeux et d’animaux féroces, ils errent çà et là, sans espoir de trouver jamais un rivage pour en sortir.

Nous eûmes le bonheur de traverser notre pont sans accident ; la tente fut bientôt dressée sur l’autre rive, et malgré le bruit étourdissant des ondes qui se précipitaient en cascades, nous passâmes une nuit fort tranquille. Le lendemain, le sentier nous conduisit par montées et descentes à travers une forêt d’épinettes très-épaisse. Au delà, le pays devient plus ouvert et ondulé ; de distance en distance nous y aperçûmes des cimetières indiens, remarquables seulement en ce que tous les poteaux plantés sur les tombes sont décorés de chaudières, de plats de bois, de fusils, d’arcs et de