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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

cer au sommeil : leurs hurlements se font entendre sur tous les tons et presque sans interruption tant que dure le festin. À la longue, on s’y habitue, et au milieu de tous les loups de la contrée on finit par dormir aussi tranquillement que si l’on était seul.

Il y a différentes espèces de loups, gris, noirs, blancs et bleus. Les loups gris sont les plus communs, du moins ceux qu’on voit le plus souvent. Le noir est très-grand et féroce ; quelquefois il s’insinue dans un troupeau de buffles de l’air le plus paisible du monde ; on ne s’aperçoit pas de sa présence ; mais malheur au jeune veau qu’il rencontre éloigné de sa mère : il est aussitôt terrassé et mis en pièces. S’ils découvrent dans le voisinage d’un précipice quelque vieil ours estropié, ils le fatiguent par leurs assauts réitérés, et le forcent à chercher son salut dans le gouffre, où ils n’ont pas de peine à l’achever. Les loups sont très-nombreux dans ces parages ; la surface des plaines est remplie de trous, où ils se retirent lorsque la nécessité ne les oblige pas à rôder. Ces trous, ordinairement profonds, sont pour eux des abris sûrs contre les chasseurs.

Un petit loup, surnommé le loup de médecine, passe pour une espèce de manitou parmi les sauvages ; ils attachent une idée superstitieuse à son aboiement, qui se fait surtout entendre le soir et pendant la nuit. Leurs jongleurs prétendent comprendre les nouvelles qu’il vient leur annon-