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VOYAGES

vailler sont chassés de la république à l’unanimité des voix et à coups de dents ; ces proscrits sont obligés de passer un hiver misérable, à moitié affamés dans quelque trou abandonné d’une rivière, où on les prend facilement. Les trappeurs les appellent castors paresseux, et disent que leur peau ne vaut pas la moitié de la peau de ceux que l’industrie persévérante et la prévoyance ont munis d’abondantes provisions et mis à l’abri des rigueurs de l’hiver. La chair du castor est grasse et délicate ; on en sert la queue comme en Europe le beurre. Leur peau, si recherchée, se paye sur les lieux de neuf à dix piastres, mais en marchandises, ce qui ne revient pas à une piastre en argent ; car une seule pinte de genièvre par exemple, qui ne coûte pas 50 centimes aux vendeurs, se vend ici jusqu’à vingt francs. Est-il étonnant que certaines gens amassent des richesses colossales ; tandis que des employés, à qui l’on donne jusqu’à neuf cents piastres par an, n’ont pas même une chemise à la fin de l’année ? Dans cette catégorie de vendeurs n’est pas comprise l’honorable Compagnie de la baie d’Hudson, dans l’Orégon ; le débit de toute liqueur y est strictement défendu.

La loutre, brune et noire, abonde dans les rivières voisines de nos montagnes, mais, comme le castor, elle est poursuivie avec avidité par les chasseurs. À propos des amphibies, un mot de la grenouille. La plus ordinaire est celle que l’on voit en Europe ; mais il y en a une autre qui en dif-