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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

première fois, que nous contemplons au milieu de nous un homme qui approche de si près du Grand-Esprit ; voici les principaux braves de ma tribu ; je les ai invités au festin que je vous ai fait préparer, afin qu’ils ne perdent jamais la mémoire d’un jour si heureux. » Il me pria ensuite de vouloir encore parler au Grand-Esprit avant de commencer le festin : je fis le signe de la croix et je dis la prière. Tant qu’elle dura, tous les convives sauvages, à l’exemple de leur chef, tinrent les mains levées vers le ciel ; au moment où je la terminai, ils abaissèrent la main droite jusqu’à terre. Je fis demander au chef une explication de cette cérémonie. « Nous levons les mains, me répondit-il, parce que nous sommes entièrement dépendants du Grand-Esprit ; c’est sa main libérale qui fournit à tous nos besoins. Nous frappons ensuite la terre, parce que nous sommes des êtres misérables, des vers qui rampent devant sa face. » Il prit alors dans mon plat un morceau de pomme blanche (racine dont ils se nourrissent) et me le mit dans la bouche avec un petit morceau de viande de buffle.

Je désirais parler à ces braves gens des principaux points du christianisme ; mais l’interprète n’était pas assez versé dans la langue pour rendre mes paroles en sioux. Le lendemain, quoique nous fussions encore à cinq journées du fort, le chef me fit accompagner par son fils et par deux autres jeunes gens, me priant de les instruire. Il