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AUX MONTAGNES ROCHEUSES

avant de partir pour la guerre, observent un jeûne rigoureux, ou plutôt ils s’abstiennent totalement de boire et de manger pendant quatre jours. Dans cet intervalle leur imagination s’exalte jusqu’au délire ; soit affaiblissement de leurs organes, soit effet naturel des projets belliqueux qu’ils nourrissent, ils prétendent avoir d’étranges visions. Les anciens et les sages de la tribu, appelés à donner l’interprétation de ces rêves, en tirent des augures plus ou moins favorables au succès de l’entreprise : leurs explications sont reçues comme des oracles sur lesquels l’expédition sera fidèlement réglée. Tant que dure le jeûne préparatoire, les guerriers se font des incisions sur le corps, s’enfoncent dans la chair des morceaux de bois au-dessous de l’omoplate, y attachent des liens de cuir, et se font suspendre à un poteau fixé horizontalement sur le bord d’un abîme qui a cent cinquante pieds de profondeur ; souvent même ils se coupent un ou deux doigts, qu’ils offrent en sacrifice au Grand-Esprit, afin qu’il leur accorde des chevelures dans la guerre qu’ils vont entreprendre. Dans une de leurs dernières escarmouches contre les Siouœ, les Arikaras tuèrent vingt de leurs ennemis et en placèrent les cadavres en tas au milieu de leur village. Alors commença leur grande danse de guerre ; hommes, femmes et enfants y assistaient. Après avoir longuement célébré les exploits de leurs braves, ils se jetèrent comme des bêtes féroces sur ces corps inanimés, les hachèrent en