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VOYAGES

dans toute la nation des Corbeaux qui n’iront pas en cet enfer dont vous nous parlez, c’est la Loutre et la Belette ; ce sont les seuls que je connaisse qui n’aient jamais ni tué, ni volé, ni commis les excès que votre loi défend. Je pourrais cependant me tromper ; dans ce cas nous irons tous en enfer de compagnie. » Le lendemain je partis ; l’un des principaux chefs me fit présent d’une belle cloche et la pendit au cou de mon cheval. Il m’invita à faire avec lui le tour du camp ; je le suivis, ma bête faisant sonner sa clochette. Il m’accompagna ensuite par civilité à une distance de six milles de son village.

Après avoir passé quelques jours à surmonter les difficultés du passage à travers les côtes stériles et entrecoupées, nous arrivâmes enfin au premier fort de la compagnie des pelleteries. On l’appelle le fort des Corbeaux. Les Américains qui y résident nous reçurent avec beaucoup de bienveillance et d’amitié ; je m’y rétablis bien vite de mes fatigues. C’est ici seulement que la fièvre intermittente m’a entièrement quitté. Les Têtes-Plates y édifièrent tout le monde par leur piété. Dans le fort aussi bien que dans le camp, et lorsque nous étions en route, nous ne manquions jamais de nous rassembler, soir et matin, pour dire les prières en commun, et chanter quelques cantiques à la louange de Dieu.

J’avais fixé mon départ du fort au 13 septembre. Je résolus de me séparer de mes fidèles Têtes-