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VOYAGES

Plein de confiance dans le Seigneur qui m’avait préservé jusqu’alors, je partis avec ma petite bande et mon fidèle Flamand, qui voulut continuer à partager mes dangers et mes travaux. Nous remontâmes pendant deux jours la Gallatine, fourche du sud du Missouri ; nous passâmes de là par une espèce de route large de plusieurs milles, pour nous rendre sur la rivière de la Roche-Jaune, le second des grands tributaires du Missouri. Là il nous fallut prendre les plus grandes précautions ; c’est pourquoi nous nous formâmes en une petite bande. Il fallait traverser des plaines à perte de vue, des terres stériles et arides, entrecoupées de profondes ravines, où à chaque pas on pouvait rencontrer des ennemis aux aguets. Des vedettes étaient envoyées dans toutes les directions pour reconnaître le terrain ; toutes les traces laissées, soit par les hommes, soit par les animaux, furent attentivement examinées. C’est ici qu’on ne peut s’empêcher d’admirer la sagacité du sauvage ; il vous dira le jour du passage de l’Indien à l’endroit où il en voit les traces ; il calculera le nombre d’hommes et de chevaux ; il distinguera si c’est un parti de guerre ou une troupe de chasse ; et même à l’empreinte des chaussures, il reconnaîtra la nation qui a foulé le sol. Tous les soirs nous choisissions un lieu favorable pour y asseoir notre camp, et nous construisions à la hâte un petit fort avec des troncs d’arbres secs, pour nous mettre à l’abri contre une attaque nocturne et soudaine.