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individuelle, cessait d’être la Marche. Celle-ci était placée sous la protection des dieux, et il est probable que dans la profondeur de ses forêts, il y avait ces retraites ombragées, visitées des dieux et consacrées à leur culte[1].

Si l’on considère la nature du premier établissement teuton qui n’a rien de commun avec la cité, il faut nécessairement conclure à l’existence de la Marche, et à son caractère inviolable. Chaque communauté qui n’est protégée ni par une enceinte, ni par la loi, doit avoir des limites qui la séparent de ses voisins, et qui la protègent contre ses rivaux, que la communauté soit réduite ou étendue ; qu’elle ait les proportions d’un simple village, d’une maison ou d’une tribu entière ; — elle aura toujours une Marche, — espace qui limitera ses propres droits, et qui la défendra des entreprises des tribus voisines. Plus la communauté, intéressée dans la Marche, est nombreuse, plus solennelles sont les formalités qui la consacrent et qui la défendent : encore les bornes de la propriété privée sont-elles sous la protection des dieux et de la loi. L’acquéreur d’un domaine privé, lui-même, n’a pas le droit de bâtir, ni de cultiver à l’extrémité de ses possessions, et il doit respecter un certain espace mitoyen. Cette règle générale n’est pas abrogée avec l’extension de la Marche primitive, et avec la confusion de plusieurs districts : si les limites premières de la Marche ont été effacées,

  1. « Stato tempore in silvam, auguriis patrum et prisca formidine sacram, omnes eiusdem sanguinis populi legationibus coeunt, cæsoque publice homine celebrant barbari ritus horrenda primordia. Est et alia luco reverentia. Nemo nisi vinculo ligatus ingreditur, ut minor, et potestatem numinis præ se ferens. Si forte prolapsus est, attolli et insurgere haud licitum, per humum evolvuntur : eoque omnis supersfitio respicit, tanquam inde initia gentis, ibi regnator omnium deus, cetera subiecta atque parentia », Germ., 39. « Apud Naharvalos antiquæ religionis lucus ostenditur », id., 43.