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colonisation des rives du Mississipi tomba avec le système de Law. Une des conséquences de cet échec, c’est qu’on en revint plus que jamais à la traite.

Cependant le régime de liberté ne paraît pas avoir produit les effets qu’on en attendait, car, à la date du 29 octobre 1719, nous voyons, dans une lettre du Ministre à M. de Ricouart[1], que les habitants de la Martinique se plaignent de n’avoir reçu aucun navire négrier depuis deux ans[2]. Peu après, la Compagnie de Saint-Domingue se voit obligée de liquider ; elle est supprimée en avril 1720[3] et remplacée, le 10 septembre suivant, par la Compagnie des Indes[4]. La nouvelle Compagnie devait avoir « le privilège exclusif, pour l’île Saint-Domingue seulement, de tirer de l’étranger, pendant le cours de quinze années, 30.000 nègres pour les vendre dans ladite île, sans être tenue de payer aucun droit ; à condition néanmoins que si, dans moins de quinze années, elle introduit les 30.000 nègres, le privilège cessera ». Le 27 septembre, un arrêt du Conseil d’État[5] « accorde et réunit à perpétuité à la Compagnie des Indes le privilège exclusif pour la côte de Guinée ». D’après l’exposé des motifs, « le concours de différents particuliers qui vont commercer sur cette côte, et leur empressement à accélérer leurs cargaisons pour éviter les frais du séjour étant cause que les naturels du pays font si excessivement baisser le prix des marchandises qu’on leur porte et tellement suracheter les nègres… que le commerce

  1. Arch. Col., B, 41, p. 277.
  2. Cf. Arch. Col., C8, vol. XXVII. Lettres de MM. Pas de Feuquières et Bénard, 1er janvier 1720. Il n’est venu que 300 nègres au lieu de 3 à 4.000, depuis deux ans. Les derniers arrivés de Guinée ont été vendus de 550 à 650 livres, tandis qu’à la Barbade 600 nègres de Madagascar ont été vendus en moyenne 200 livres. Quelle tentation pour les colons d’aller se pourvoir eux-mêmes à Madagascar ! — Cf. aussi C8, vol. XXIX. Lettre de M. Bénard, 25 août 1721, Il parle de 11.659 nègres introduits à la Martinique depuis le 1er janvier 1714. mais il n’en vient plus depuis assez longtemps, les négriers allant de préférence à Saint-Domingue.
  3. Moreau de Saint-Méry, II, 666. Lettres patentes.
  4. Id., Ibid., 692.
  5. Id., Ibid, 698.