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de Nantes à aller en Guinée, c’est à la condition qu’ils paieront à la Compagnie 20 livres par tête de nègre devant être transporté à Saint-Domingue et 10 livres pour ceux qui sont destinés aux autres îles[1]. Exception est faite en faveur de quelques marchands de la Martinique, qui pourront envoyer, chaque année, en Guinée, « tant que la guerre durera », un bâtiment contenant de 4 à 500 nègres, mais seront tenus de payer 13 livres par tête au commis de la Compagnie de l’Assiente pour les frais de comptoir de Juda, et de destiner 100 nègres pour la Guadeloupe[2]. »

Tandis que le gouvernement français se montrait si sévère à l’égard de ses propres nationaux, la contrebande était exercée presque ouvertement par les Espagnols, avec l’appui secret du marquis de la Villaroche, gouverneur de Portobello. Le Ministre prévient le sieur Hubreck, son correspondant à Paris, qu’il ait à mettre fin à cette fraude, qui « ruine entièrement » la Compagnie de l’Assiente[3]. Mais nous ne savons pas exactement ce qui advint. À ce moment, la guerre empêchait les vaisseaux des Compagnies d’aller faire régulièrement la traite en Guinée ; il y avait trop de risques à courir. C’est ce qu’explique le Ministre dans une lettre au sieur Mercier : « Sa Majesté veut que vous empêchiez sévèrement l’exécution de tout commerce étranger dans Saint-Domingue, ne laissant qu’aux Compagnies de l’Assiente et de Saint-Domingue… la liberté de tirer des nègres de Corassol et de Saint-Thomas[4]. » La Compagnie de Saint-Domingue ayant passé avec les Hollandais des traités approuvés par le roi, il est entendu qu’elle partagera avec l’autre les nègres qui

  1. Arch. Col., B, 31, p. 463. Lettre aux directeurs de l’Assiente, 2 mai 1708.
  2. Ib., F, 250, p. 641, 25 juillet 1708 ; et B, 31, p. 91. Lettre à M. de Vaucresson.
  3. Arch. Col., B, 31, p. 15. Lettre du 8 février 1708, et p. 17, même jour, Lettres au marquis de la Villaroche et à M. Amelot, à Paris, afin de prier celui-ci, s’il le juge à propos, de « faire donner des ordres secrets par le roi d’Espagne pour examiner sa conduite et la vérité des faits ».
  4. Ib., B, 31, p. 157.